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Le « barème Macron » appliqué par le conseil de prud’hommes de Caen en formation de départage

Tous les conseils de prud’hommes (CPH) ne sont pas à l’unisson contre le « barème Macron ». Le 18 décembre 2018, le CPH de Caen, en formation de départage, a appliqué le barème d’indemnisation du licenciement sans cause réelle et sérieuse, écartant l’argument de non-conformité à la Convention 158 de l’organisation internationale du travail (OIT) et à la Charte sociale européenne.

Alors que certains titres de presse parlaient déjà de « fin du barème Macron », suite aux récents jugements des conseils de prud’hommes de Troyes, Lyon et Amiens qui ont considéré le barème non conforme aux textes internationaux et européens (http://rfsocial.grouperf.com/depeches/42853.html), un jugement du CPH de Caen du 18 décembre 2018, rendu en formation de départage, rappelle qu’il n’y a pas de « fronde » unanime contre le barème.

Ce faisant, le CPH de Caen fait écho au CPH du Mans, qui avait déjà validé le barème à l’automne 2018 (CPH du Mans, 26 septembre 2018, RG F 17/00538 ; http://revuefiduciaire.grouperf.com/plussurlenet/complements/20181214_CPH_LeMans_26sept18.pdf).

Pour mettre en cause le barème Macron devant le CPH de Caen, le salarié avait aussi soulevé « l’inconventionnalité du barème », à savoir sa non-conformité à la convention 158 de l’OIT et à la Charte sociale européenne.

Mais le CPH de Caen ne l’a pas retenu et s’est fondé sur la décision du Conseil constitutionnel qui avait entériné le barème, lors de l’adoption de la loi de ratification des ordonnances Macron de septembre 2017 (C. constit., décision 2018-761 DC du 21 mars 2018, JO du 31).

Dans un contexte de résiliation judiciaire du contrat de travail, le CPH de Caen relève ainsi que, sur le fond, « le Conseil constitutionnel a considéré que l’indemnisation prévue par le barème répondait à l’exigence de réparation "adéquate" en cas de licenciement injustifié », soit la même exigence que celle prévue par la convention 158 de l’OIT (art. 10) et la Charte sociale européenne.

Dès lors, le CPH a jugé qu’en l’espèce, il y avait lieu d’appliquer le barème, « en l’absence de démonstration de l’existence d’un préjudice dont la réparation adéquate serait manifestement rendue impossible par l’application du plafond du barème ». Une réserve que les spécialistes auront pris soin de relever...

Notons que, sur la Charte sociale européenne, le CPH de Caen estime que son « application directe en droit interne est sujette à d’importantes réserves ». C’était aussi l’un des points soulevés par le CPH du Mans, qui avait refusé d’appliquer la Charte sociale européenne.

Concrètement, le CPH a octroyé à la salariée, qui travaillait à temps partiel dans une entreprise de propreté et dont l’ancienneté était comprise entre un et deux ans, une indemnité de 1 500 €, tenant compte de son préjudice particulier pour retrouver un emploi en raison de son âge (51 ans), de sa situation de famille et de sa difficulté à maîtriser le français.

S’il en était besoin, ce jugement confirme que l’on se trouve dans une période d’incertitude. Les partisans et opposants du barème pourront comptabiliser les décisions selon qu’elles vont dans leur sens ou pas.

En tout état de cause, pour y voir plus clair, il n’y a guère d’autre choix que d’attendre que la Cour de cassation ait l’occasion de trancher la question, et de dire une fois pour toutes si le barème Macron est conforme ou non à la convention 158 de l’OIT et/ou à la Charte sociale européenne.

CPH de Caen, 18 décembre 2018, RG F 17/00193 ; http://revuefiduciaire.grouperf.com/plussurlenet/complements/20190118_CPHCaen18decembre2018.pdf

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